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Ce ne sont pas vos personnages habituels que vous allez incarner, mais des créations inventées pour le moment. Figures jetées sur le papier le temps d'un post. N'hésitez pas à multiplier les participations, en renouvelant le personnage incarné à chaque fois. C'est la Ville, son mystère, ses figures étranges surgies de la brume du fleuve pour contempler la dépouille à la dérive d'une matriarche assassinée. Le jeu étant de sortir à chaque fois du cadre habituel de vos RPs. De surprendre les lecteurs, avec des créations à la volée.
Elle restait immobile, à fixer de longues minutes durant le silence morne des Cascades. Un passage permanent vers l'Avalon, disaient ceux qui n'étaient guère au point des confidences Sëylis. Une légende urbaine tenue depuis l'éternité par les Rois des Songes, qui ne faisait qu'alimenter le mythe que tous avaient construit autour de cette Famille si secrète, si jalouse de ses propres histoires que l'on ne pouvait savoir si toutes étaient réelles.
Ces pauvres hères se retrouvant non loin du pont lorsque la silhouette apparaissait, ne parvenaient à l'atteindre. Car si l'on posait un pied sur le pont, si l'on osait affronter le brouillard dont la Silencieuse se drapait, jamais l'on ne pouvait s'en approcher. Quelques pas depuis le bord du pont, que déjà l'on se retrouvait de l'autre côté sans caresser l'opportunité de pouvoir tendre le bras vers cette silhouette solitaire.
Impossible de discerner son visage ; mais uniquement cette longue robe blanche dont elle était vêtue. Une jeune mariée, disaient certains, dont le promis avait péri sous la violence des Cascades s'échouant à la surface du Fleuve, et qui jamais ne désespérait de le voir revenir depuis l'immense rideau de bruine. Depuis les tréfonds de l'Avalon.
Peut-être cela était possible, tant la Ville recèle de secrets inconnus. Tant de chose qu'elle dissimulait, ne révélait que lorsqu'elle le souhaitait. Et le quartier Perle, les Sëylis eux-mêmes ne dévoilaient guère souvent leurs légendes, les réelles histoires qui composaient leurs livres et grimoires.
Parmi les plus fervents croyants, les plus éminents érudits, les plus sages mages. Les cartomanciennes aux tarots affûtés et les prêtres vaudous qui établissaient leurs présages dans pierres et viscères. Les voyantes Opales, ces vierges aveugles d'avoir tant regardé dans l'immensité du Cosmos pour y voir l'avenir. Interprétation de signes, légendes répertoriées dans les livres. Tout n'amenait qu'à la même conclusion.
« Au glas de l'Obscurité et à l'apogée de l'Hiver,
Lorsque les ténèbres engloutiront toute lumière,
Au firmament de la Lune et au cœur du Silence,
Alors que l'Opacité montrera son impatience,
L'astre de sa pâleur perdra,
Puis comme avant, tout redeviendra.
Mais de l'Ethérée le Fleuve se gorgera. »
Tant d'appréhension face aux frissons glacés qui provoquait la Prophétie annoncée. Tant de terreur, surtout, car même les plus anciens érudits ne parvenait à en déchiffrer le sens véritable. Des conjonctures furent énoncées, à n'en point douter, mais de si terrifiantes, si maudites que les lèvres demeurèrent closes. A la rumeur de la Ville de faire son office.Lorsque les ténèbres engloutiront toute lumière,
Au firmament de la Lune et au cœur du Silence,
Alors que l'Opacité montrera son impatience,
L'astre de sa pâleur perdra,
Puis comme avant, tout redeviendra.
Mais de l'Ethérée le Fleuve se gorgera. »
Cette nuit marquait la jonction entre Solstice et Equinoxe. Bientôt, bientôt le Printemps serait de retour en chassant de sa venue le gel et la grêle, le froid et la neige. Cette même neige qui recouvrait les rambardes du pont surplombant le Fleuve.
Au glas de l'Obscurité et à l'apogée de l'Hiver.
A l'instant où la silhouette apparut sur le pont, où se détacha l'ondulation gracieuse de ses cheveux sous ses pas mesurés, presque prudents, les réverbères agonisèrent. Grésil de lumière qui s'acheva par leur extinction la plus complète.
Lorsque les ténèbres engloutiront toute lumière.
Ne demeurait alors plus que la Lune à son zénith. Si pâle, si ronde, si lisse. Dans sa lente ascension, elle absorba le murmure des Cascades qui se turent de concert. Engloutir le fracas de l'eau pour mieux y projeter sa lumière blême de faiblesse.
Au firmament de la Lune et au cœur du Silence.
Du rythme égal au silence, à la lune et l'obscurité, la Brume se leva crescendo. On jura qu'au loin, si loin, le glas macabre d'une horloge sonna minuit, comme pour achever la montée du brouillard qui se faisait de plus en plus épais. Masquer la silhouette et ce pont maudit, se déverser sur le Fleuve en contrebas.
Alors que l'Opacité montrera son impatience.
Au neuvième son de cloche se joua ce que l'on redoutait. Brusquement la Lune se mit à rougir, jetant alors un voile pourpre sur le quartier. Et la Brume qui protégeait farouchement la silhouette solitaire en reflétait avec perfection la teinte. L'absorbait, s'en gorgeait comme un enfant tétant avec avidité le sein de sa mère.
L'astre de sa pâleur perdra.
Douzième et ultime glas. Le fracas dissipé, l'écho disparut. Tout s'était volatilisé. La lune redevint subitement blême. Le brouillard, avec une folle rapidité à l'image des rats fuyant à toute vitesse les flammes, s'éteignit. Le silence se brisa en retrouvant le fracas fou de l'eau. Quant aux réverbères, ils se parèrent de leur éclat pâle.
Puis comme avant, tout redeviendra.
Sur le pont, là où se tenait jusqu'alors la silhouette inconnue. Daëva gisait. Et de la plaie béante lui déchirant le ventre, le sang s'écoulait pour venir s'échouer dans le Fleuve. Lui qui, pour la première fois depuis des décennies, perdit de sa pureté, de la clarté de ses eaux. Pour se teindre du sang pourpre de sa Reine.
Mais de l'Ethérée le Fleuve se gorgera.